A la fin du mois d’octobre 2023, deux débats ont été organisés à Toulouse autour de la RSE : le premier lors du Congrès international de la RSE portant sur l’impact de la RSE en entreprise, et le second au sein de l’école de commerce Toulouse School of Economics sur le thème de la décarbonation de l’économie.
Du 18 au 20 octobre 2023 a eu lieu à Toulouse la deuxième édition du Congrès international de la RSE organisé par la fondation Oïkos. L’événement proposait plus de 75 ateliers, conférences et tables rondes. Deux déjeuners-débats ont également été organisés, dont un réunissant trois représentants de syndicats patronaux : Emmanuelle Besse, du Mouvement Impact France, Diego Exposito, délégué régional de l’Union régionale des sociétés coopératives participatives (Urscop) Occitanie, et Pierre-Olivier Nau, président du Medef 31.
Le débat, présenté le 19 octobre 2023 dans un article de ToulEco, le média de l’économie en Occitanie, s’intitulait : « Comment la RSE bouscule l’entreprise : opportunité ou cataclysme ? ». Les participants ont été invités à échanger sur leurs perspectives en matière de RSE et sur la manière dont le pouvoir et la valeur coexistent au sein des entreprises.
Emmanuelle Besse, membre du Mouvement Impact France, qui représente les entreprises engagées au sein de l’économie sociale et solidaire, et dirigeante du cabinet Wunjo dédié à la qualité de vie au travail, a souligné l’importance de l’approche de la RSE au sein de chaque entreprise. Selon elle, le fait que de nombreux entrepreneurs n’approfondissent pas leurs motivations pour le changement est problématique. Certains se contentent de s’y conformer soit pour des raisons légales, soit pour des considérations d’image. Or, « un plan d’action RSE ne suffit pas. Il faut aussi que la personne qui porte ce plan ait une place prépondérante dans les organes de gouvernance » a-t-elle précisé lors du déjeuner.
Pierre-Olivier Nau, président du Medef 31 et dirigeant de Manatour, acteur du tourisme industriel, scientifique, technique et culturel, a souligné le fait que le modèle des Scop, où chaque membre a une voix égale, ne peut pas être reproduit dans des entreprises de grande taille ou stratégiques. Contrairement à Emmanuelle Besse qui considère que le modèle est viable à condition que les perceptions traditionnelles du pouvoir soient remises en question, Pierre-Olivier Nau pense que « cela ne peut pas fonctionner dans un nombre certain d’entreprises où il y a besoin d’un actionnaire qui tranche ». De son côté, Diego Exposito, délégué régional de l’union des Scop, a précisé qu’un certain nombre de chefs d’entreprises traditionnelles était intéressé par le modèle des sociétés coopératives. « Ils viennent nous dire : “Aidez-nous à penser et travailler différemment”. Notre modèle part de l’idée au départ utopique de mise en commun des outils de production. Mais je crois que cette idée de partage de la valeur et du pouvoir peut s’appliquer à différentes échelles et niveaux » a-t-il expliqué.
En revanche, un point d’accord entre les trois représentants a émergé en ce qui concerne la nécessité d’agir de manière plus décisive face à l’accélération du réchauffement climatique. « Il y a eu une insoutenable légèreté comme dirait Kundera dans la gestion du réchauffement climatique. Il y a un devoir moral des entrepreneurs à changer progressivement leurs pratiques. On voit que les jeunes entrepreneurs ont tout particulièrement conscience de ces enjeux » a conclu Pierre-Olivier Nau, dont les propos ont été rapportés dans l’article de ToulEco.
Quelques jours après, le 23 octobre 2023, l’école de commerce Toulouse School of Economics a reçu Jean-Marc Jancovici, ingénieur et expert du dérèglement climatique, afin qu’il puisse débattre avec l’économiste Christian Gollier, directeur général de l’établissement, sur le sujet de la décarbonation de l’économie.
Selon Jean-Marc Jancovici, dont les propos ont été rapportés dans un second article de ToulEco, publié le 23 octobre, il est nécessaire de repenser fondamentalement notre modèle économique pour faire face à l’accélération du changement climatique. Il est ainsi indispensable d’agir « contre l’économie dominante des deux derniers siècles » et « l’instinct accumulatif de l’être humain ».
De son côté, Christian Gollier est d’accord avec le fait que la décarbonation ne peut pas être confiée au marché car, selon lui, ce dernier s’est montré incapable de faire face efficacement au réchauffement climatique. L’économiste a souligné la nécessité de choisir parmi diverses mesures, en privilégiant celles qui ont le moins d’impact sur la population. Il a notamment évoqué la possibilité d’imposer un prix du carbone par le biais d’une taxe sur les émissions de CO2. Toutefois, Jean-Marc Jancovici a exprimé des réserves sur cette approche, soulignant que la taxation du carbone peut fonctionner pour l’industrie, mais pas nécessairement pour les ménages qui n’ont pas la même capacité d’adaptation. La clé, selon lui, est de montrer aux citoyens comment la transition écologique peut apporter des avantages en matière d’emploi, de paix sociale et de sécurité. « Nous n’avons pas le choix. Je suis par exemple pour un quota fixé de trajets en avion à effectuer dans sa vie. C’est une mesure restrictive, pas forcément très populaire dans une ville comme Toulouse où l’aviation a un poids important encore », explique ainsi Jean-Marc Jancovici.
Malgré des désaccords sur les solutions spécifiques, les deux hommes s’accordent sur le fait qu’il ne faut pas attendre une action significative au niveau international. Ils estiment en effet que les États doivent agir localement.