Puisque le réchauffement climatique est désormais une préoccupation majeure des français, la publicité s’est emparée de ce sujet, parfois à mauvais escient. Accusées de greenwashing, les entreprises doivent donc s’engager concrètement sur les thématiques environnementales et sociétales. La société de consommation étant elle-même décriée, de nouveaux modèles responsables doivent être proposés par les professionnels de la communication aux entreprises, qui peuvent ainsi impulser un véritable changement.
Un nouveau baromètre « Fractures françaises » réalisé par Ipsos, Sopra-Steria, Le Monde, le Cevipof et la Fondation Jean Jaurès a été publié en octobre 2022. Il met en exergue une nouvelle donne : désormais, le réchauffement climatique est au cœur des préoccupations des français, après le pouvoir d’achat, mais devant les problématiques liées à la santé, l’immigration ou la sécurité. Cette priorité est partagée par tous, sans distinction de sexe, d’âge ou de pouvoir d’achat.
Conséquence : un nombre croissant de publicités utilise le thème de l’« engagement environnemental ». Un article du journal Le Monde consacré au sujet indique ainsi que cette thématique a atteint 5 697 campagnes en 2020 et 2021, selon le groupe de communication WNP. Parallèlement, le nombre de plaintes déposées auprès de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP) concerne désormais majoritairement des accusations de greenwashing.
« Nous sommes à un moment critique, face à un virage d’une ampleur aussi importante que celui de la révolution digitale, où la société de consommation est de plus en plus remise en cause. La publicité, qui est sa devanture, l’est d’autant plus. » explique au journal Gildas Bonnel, président de l’agence de communication Sidièse et président de la commission du développement durable à l’AACC (l’association des agences conseils en communication), révélant ainsi l’ambiguïté de la situation.
Le consommateur n’accepte plus aujourd’hui cette image enjolivée qui masque parfois le véritable impact social et écologique des activités de l’entreprise. L’Ademe, l’agence française de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, explique en outre dans un article publié sur son site internet que la communication responsable ne peut plus se résumer à une publication responsable. Cela signifie qu’il ne suffit plus de réduire l’emprunte carbone de sa communication : ce sont les messages véhiculés qui doivent être repensés afin d’être davantage engagés, tant au niveau environnemental que sociétal.
La publicité a un impact important sur le niveau de consommation d’une population. « Si la lutte contre le greenwashing est évidente, certains freins à la transition écologique sont plus discrets. La mise en scène d’un produit peut inconsciemment véhiculer des stéréotypes : un lagon pour évoquer les vacances, de la viande pour montrer une table conviviale, une grosse voiture pour suggérer la réussite… Cela contribue à faire croire que le bonheur passe par là. » explique Mathieu Jahnich, consultant-chercheur, spécialiste de la lutte contre le greenwashing, invitant ainsi à l’émergence de nouveaux modèles de communication, basés sur la sobriété et la simplicité.
Selon l’Ademe, véhiculer un message responsable n’est pas suffisant pour changer de modèle. Les communicants eux-mêmes ont un rôle à jouer, qui passe par une étroite collaboration avec les entreprises. En effet, instaurer une communication responsable n’est possible que si des actes concrets sont réalisés par l’entreprise, afin d’éviter toute critique de greenwashing. Les professionnels de la communication ont donc la possibilité d’impulser eux-mêmes une politique RSE au sein d’une entreprise et de travailler avec l’ensemble des parties prenantes, que ce soit les différentes directions mais aussi l’ensemble des salariés, les fournisseurs, les clients et même les collectivités. L’Ademe parie ainsi sur l’influence des communicants et considère alors qu’adopter une communication responsable peut engendrer un véritable changement écologique et sociétal.
« Nous devons avoir un rôle de conseil et de stratégie pour orienter les entreprises vers des projets accélérateurs de transition écologique comme l’utilisation de matériaux biosourcés. Mais il y a également un enjeu de création. Il faut parvenir à générer des imaginaires positifs autour de la transition écologique, de l’injonction « moins mais mieux »… pour que la sobriété ne soit pas simplement synonyme de grelotter chez soi. Enfin, il est impératif de militer pour la relocalisation de la production en France. » conclut dans le journal le Monde Bertille Toledano, présidente du groupe BETC France (Havas) et coprésidente de l’AACC.