La sobriété numérique est un défi majeur en matière de RSE car la croissance soutenue du numérique pourrait conduire à un triplement de son empreinte carbone d’ici 2050. Des mesures doivent donc être mises en place. La loi REEN a notamment été instaurée en 2021 dans cet objectif et pourrait être durcie prochainement.
La transition numérique, marquée par l’avènement de l’intelligence artificielle et de la 5G, est aujourd’hui incontournable dans divers secteurs tels que la santé, l’éducation et l’industrie. Cependant, cette évolution a également un impact environnemental significatif, représentant jusqu’à 2,5 % des émissions de CO2 en France selon l’Ademe et près de 4 % au niveau mondial en 2018 selon un rapport de The Shift Project.
La sobriété numérique est donc un défi majeur en matière de RSE car la croissance soutenue du numérique pourrait conduire à un triplement de son empreinte carbone d’ici 2050 si aucune inflexion significative n’est apportée. Actuellement, bien que les opérateurs télécoms comme Orange et Free aient mis en place des initiatives de recyclage et de reconditionnement des smartphones, la sobriété numérique n’est pas encore pleinement intégrée aux engagements RSE des entreprises. En outre, la sobriété numérique ne constitue pas encore un critère de préférence de marque pour la majorité des consommateurs. Pourtant, le rythme actuel de croissance du numérique n’est pas soutenable sur le long terme.
Près de 79 % de l’empreinte carbone du numérique provient de la phase de fabrication des terminaux, sans parler des ressources en métaux et minéraux qu’ils requièrent et de la conséquence de leur extraction. Cela prouve la nécessité urgente de limiter le renouvellement des appareils numériques. « Nous pourrions être la dernière génération à profiter sans contrainte du numérique. Il nous reste au mieux quelques décennies, et non quelques siècles, de stocks de matériaux avec lesquels on fabrique le numérique et la technologie en général (…) Que cela nous plaise ou pas, le monde de demain sera plus low tech qu’aujourd’hui. » explique Frédéric Bordage, fondateur du collectif d’experts GreenIT.fr, au magazine Le Hub, dans un article publié en août 2023.
En réponse à cette problématique, la France a adopté en 2021 la loi REEN (Réduire l’Empreinte Environnementale du Numérique), qui vise à sensibiliser sur le sujet de l’impact environnemental du numérique. Des mesures qui concernent notamment les consommateurs se mettent en place. Il est par exemple proposé de réaliser des sites Internet plus simples qui vont rapidement à l’essentiel. « Être plus raisonnable, cela commence par se demander si le numérique est indispensable pour résoudre un problème. Et s’il est incontournable, il faut réussir à trouver les moyens les plus sobres pour le mettre en œuvre. Envoyer un mail coûte par exemple moins cher, d’un point de vue environnemental comme économique, que de développer une application mobile. » précise Frédéric Bordage, avant d’encourager à limiter le matraquage publicitaire. Des sollicitations plus rares et plus ciblées sont finalement plus efficaces et plus écologiques.
Pour faire face à l’impact environnemental du numérique, la loi REEN a été instaurée en novembre 2021 en France. Elle vise à sensibiliser et responsabiliser l’ensemble des acteurs : consommateurs, entreprises et collectivités territoriales.
« La loi REEN (Réduction de l’Empreinte Environnementale du Numérique) qui comprend le texte de Loi n°2021-1485 et son décret d’application N° 2022-1084 du 29 juillet 2022, entend faire converger transition numérique et transition écologique. Ce texte vise à limiter l’impact du numérique à grande échelle en agissant aussi bien sur les comportements des consommateurs, les politiques de fabrication des entreprises que sur la gestion par les collectivités locales. Il s’agit bien là de responsabiliser tous les acteurs du numérique, à toutes les étapes de la vie d’un produit. » résume l’article du site de BPI France consacré au sujet et paru en novembre 2023.
La loi REEN comporte cinq grands enjeux liés à la RSE. Elle lutte contre l’obsolescence programmée, notamment logicielle (c’est-à-dire des mises à jour rendant l’appareil obsolète), en informant les consommateurs sur les conséquences de ces mises à jour. Selon l’Ademe, allonger la durée d’usage des appareils de deux à quatre ans améliorerait déjà de 50 % leur bilan environnemental. La loi impose aussi aux communes de plus de 50 000 habitants d’élaborer une stratégie numérique responsable, prenant en compte les enjeux de récupération de chaleur des datacenters et le recyclage des équipements numériques. En outre, la sensibilisation à l’impact environnemental du numérique est intégrée aux cursus scolaires et les fabricants doivent communiquer sur la consommation énergétique de leurs équipements numériques. Enfin, la loi impose un référentiel d’éco-conception des services, comprenant notamment l’encadrement du démarchage téléphonique, à partir de 2024, et la réduction de la consommation énergétique des centres de données.
Bien que la loi REEN ne prévoie pas de sanctions directes, les entreprises qui ne s’y conforment pas encourent des risques importants tels que des préjudices inhérents à leur image, la perte de clients et de partenaires, des litiges juridiques potentiels, ainsi que la diminution de leur compétitivité. Des mesures plus contraignantes sont envisagées pour renforcer l’impact de la loi et encourager une approche numérique plus responsable. Et si à l’inverse, comme le souhaite Eric Vidalenc, auteur de l’ouvrage Pour une écologie numérique, dans un article d’Archimag paru en 2022, le numérique se mettait au service de la transition écologique ?