Une récente étude a mis une nouvelle fois en lumière les avancées de la Scandinavie en matière de RSE. Cette dernière propose une autre voie, en démontrant que les valeurs et les intérêts économiques peuvent coexister. De leur côté, les Pays-bas ont mis en place de nombreuses mesures pour lutter contre le dérèglement climatique.
L’étude sur la RSE des entreprises européennes, de l’OCDE et des BICS, parue en septembre 2023 et réalisée par le Médiateur des entreprises et EcoVadis, a révélé des avancées significatives dans les performances des entreprises françaises en matière de RSE. La France se situe ainsi à la quatrième place du classement. Mais l’étude met surtout en lumière la domination des pays nordiques puisque la Norvège, la Finlande et la Suède se retrouvent sur le podium.
Ces pays ont en effet montré de tels progrès au cours des deux dernières années que les chercheurs ont créé une nouvelle catégorie de pays, appelée « Nordics », aux côtés des catégories traditionnelles telles que l’OCDE ou les BICS.
L’avance prise par ces pays s’est même accentuée. Elle repose sur le principe des « locomotives », illustré par la part croissante d’entreprises fortement engagées dans des pratiques RSE exemplaires. Ainsi, l’engagement dans le développement et la mise en œuvre de pratiques RSE semble encourager davantage d’efforts, comme si les avantages obtenus stimulaient les entreprises les plus avancées à repousser les limites. Cette analyse semble aussi s’appliquer au niveau d’un pays.
« Les pays nordiques nous montrent une autre voie, plus pragmatique, dans le sens où elle repose sur des intérêts économiques mieux compris, bien plus que sur les valeurs des dirigeants (ce qui ne les exclut pas bien entendu). » explique en octobre 2023 Hugues Poissonnier, professeur d’économie et de management, dans un article du site d’information The Conversation.
Par exemple, en ce qui concerne les achats responsables, leurs progrès dans ce domaine reposent largement sur des démarches avancées d’analyse et d’évaluation des risques liés à la RSE. Ils démontrent que les valeurs et les intérêts économiques peuvent coexister harmonieusement, renforçant de cette manière l’application pratique de la RSE.
Ainsi, dans l’édition 2023 de l’étude RSE EcoVadis/Le Médiateur des entreprises, on constate que la cartographie des risques liés aux achats est en place chez 20 % des entreprises évaluées dans les pays nordiques, contre 14 % en France. Cette différence s’explique principalement par les niveaux de pratiques observés au sein des grandes entreprises employant 1 000 salariés et plus.
Les pays nordiques ont davantage saisi l’importance des opportunités dans la réduction des risques. Il ne s’agit pas de la part des Nordics d’opposer les valeurs aux intérêts économiques, mais plutôt de renforcer l’application de ces dernières grâce aux avantages économiques. En effet, même si la mise en œuvre des pratiques responsables impliquent des coûts, ne rien faire s’avérera bien plus coûteux. Parfois même elles peuvent engendrer des économies. Ces arguments financiers solides permettent aux chefs d’entreprises nordiques d’agir de manière plus cohérente avec leurs valeurs sans mettre de côté les intérêts économiques.
La réglementation joue également un rôle essentiel dans l’engagement RSE d’un pays. En avril 2023, le gouvernement néerlandais a établi un plan contenant 120 mesures pour un montant de 28 milliards d’euros. Il vise une réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990, afin de répondre aux objectifs européens. Une mesure emblématique consiste à fermer toutes les centrales électriques fonctionnant au gaz et au charbon d’ici 2035. Les Pays-Bas, en tant que troisième producteur européen de gaz, réduiront progressivement leur dépendance aux énergies fossiles au profit des énergies renouvelables et du nucléaire.
C’est également sous la pression de la justice, suite à leur double condamnation en 2019, que les Pays-Bas ont commencé une véritable transition verte, engendrant la révision de leurs objectifs climatiques et la réduction des émissions d’azote. Ainsi, le gouvernement néerlandais a annulé tous les projets de construction de routes et de lignes ferroviaires, conformément à une décision du Conseil d’État néerlandais de 2019 obligeant le pays à réduire ses émissions d’azote de 50 % d’ici 2030. Les exploitations agricoles, responsables de 46 % de ces émissions, sont également soumises à des restrictions, notamment une baisse de 30 % du cheptel.
Enfin, les Pays-Bas ont pris des mesures significatives pour lutter contre le changement climatique, notamment en plafonnant le nombre de vols à l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol et en interdisant les jets privés. Ces actions font suite à la condamnation des Pays-Bas par la Cour suprême en 2019 pour non-respect de ses objectifs climatiques. « De quoi donner de l’espoir aux milliers d’autres procès climatiques actuellement en cours, à l’instar de l’Affaire du Siècle en France » conclut la journaliste Concepcion Alvarez, dans un article du site d’information Novethic, paru en mai 2023.